Kères

Nature et essence

Les Kères sont des esprits féminins redoutables, personnifications de la mort violente. Issues de Nyx, la Nuit primordiale, elles représentent l’aspect le plus terrifiant du destin : la mort brutale qui frappe sans avertir, souvent dans la fureur du combat. Elles se distinguent clairement de Thanatos, qui incarne la mort paisible, et des Érinyes, liées à la justice du sang.

Elles n’apportent ni ordre, ni équilibre : elles sont la violence à l’état pur.

Origine

Selon Hésiode (et lui seul), les Kères sont nées de Nyx seule, au même titre que :

• Moros (fatalité),
• Hypnos (sommeil),
• Thanatos (mort douce),
• Éris (discorde),
• Apate (tromperie),
• Géras (vieillesse).

Elles appartiennent donc à la lignée des puissances abstraites primitives qui structurent les limites de l’existence humaine.

Rôle dans la mythologie

Les Kères interviennent presque exclusivement dans les contextes de guerre et de violence extrême. Elles hantent les champs de bataille, volant au-dessus des combattants pour s’emparer des mourants. Leur fonction est de déchirer l’âme ou de boire le sang des victimes, selon les traditions.

Dans l’Iliade, Zeus pèse parfois les “Kères” des héros dans sa balance : il s’agit alors de leur part de destinée funeste, une image concrète de leur mort prochaine.

Elles n’ont pas de personnalité individuelle : ce sont des forces collectives, des présences, des ombres agressives.

Apparence et symbolique

Elles sont souvent décrites ou représentées (dans la céramique archaïque et l’art noir) comme :

• des femmes ailées,
• au visage féroce,
• aux ongles ou aux dents acérées,
• drapées de voiles sombres,
• parfois avec du sang aux lèvres.

Leur iconographie évoque la violence incontrôlable, la terreur brutale et la fatalité crue du champ de bataille.

Place cosmologique

Les Kères incarnent l’un des aspects fondamentaux de l’expérience humaine pour les Grecs : la mort violente, imprévisible, inévitable pour nombre de héros et de mortels.
Elles ne jugent pas, ne punissent pas, ne protègent pas. Elles prennent.
Elles représentent le versant sombre et inéluctable de la destinée guerrière.